La production de plants de vigne en Afrique du Sud, Nouvelle-Zélande et Californie
Etats-Unis: relationnel et réactivité
D’après Laurent Audeguin, un point fort aux Etats-Unis, ce sont les relations entre les pépiniéristes et leurs clients viticulteurs. Ces derniers ont une forte connaissance du matériel végétal. Ils suivent de près les vignes-mères, les pépinières, la production de leurs plants, commandent à l’avance… et paient un acompte de 30 à 40 % du prix à la commande. En fonction des assemblages, le prix est variable, mais il est en moyenne de 4$, soit environ trois fois plus qu’en France.
Autre caractéristique : la pépinière viticole américaine est très réactive. Les entreprises peuvent diffuser très rapidement l’innovation végétale.
Plusieurs raisons à cela :
- il n’existe pas d’organismes de pré-multiplication. Le matériel initial est détenu par le FPS (Foundation Plant Services), qui dépend de l’Université de Davis (Californie). Les pépiniéristes reçoivent le matériel et le multiplient directement. Un agrément est nécessaire pour les parcelles de vignes-mères, mais elles peuvent être agrandies sans redemander du matériel à la FPS.
- la durée de vie des vignes-mères est de 12 à 15 ans, ce qui facilite le renouvellement et l’éventuelle mobilité géographique.
- la moitié de la production se fait en pots, proportion qui tend à augmenter.
- le secteur est relativement concentré : il n’y a que cinq à six gros opérateurs.
- les conditions de production sont plus favorables : les vignes-mères sont cultivées le plus souvent en franc-de-pied (pas d’étape de greffage), pas de nématodes vecteurs de népovirus, et encore de grands espace vierges à conquérir pour de nouvelles vignes-mères.
Toutefois, les Américains doivent aussi faire face à des difficultés : la maladie de Pierce reste une menace et le Red Blotch sévit depuis dix ans. D’ailleurs, le FPS a décidé d’assainir tout le matériel certifié (c’est le protocole 2010).
Mais ayant choisi de relocaliser leur matériel initial « super certifié » sur un site en plein air proche de Davis et des vignobles (le Russel Ranch), le FPS constate depuis deux ans des recontaminations croissantes par le virus du Red blotch (GRBaV). Cet exemple pourrait conforter l’idée d’une sécurisation en conditions confinées en France.
Nouvelle-Zélande : certification d’entreprise et formation
En Nouvelle-Zélande, la production de plants est centralisée autour de sept pépiniéristes.
La plus grosse entreprise, Riversun Nursery, fournit à elle seule 60 à 70 % du marché. Il n’existe pas de matériel végétal certifié par l’État. Les entreprises et les plants sont certifiés selon une norme établie en lien entre les viticulteurs et les pépiniéristes, sous l’égide de New-Zealand Wines. Cette qualité a un prix, équivalent à deux fois le prix français environ.
Dans ce pays où la quarantaine est la plus stricte au monde et où règne le souci d’excellence, l’accent est mis sur la formation. Tous les trois ans, tous les chefs d’entreprise doivent se former ou entretenir leur savoir, comme en ampélographie. Un examen final sanctionne même ces formations depuis 2013.
Afrique du Sud : isolement et lutte collective
L’organisation de la production de plants en Afrique du Sud est assez comparable à celle de la France , avec un organisme central (Vititec) qui contrôle 95% de la diffusion de matériel greffable.
Une différence majeure est que tout le matériel initial que détient Vititec est conservé dans une serre insect-proof, avec une copie de ce matériel planté dans un endroit semi-désertique, à 300 km au Nord de Paarl et à 50 km du plus proche vignoble. Au fur et à mesure que le matériel devient moins stratégique, les mesures de confinement s’assouplissent et les parcelles se rapprochent du vignoble, pour plus de commodité.
Le deuxième point fort de l’organisation sud-africaine est le plan de lutte collectif contre l’enroulement mis en place depuis une dizaine d’années. Formations, prospections et arrachages prophylactiques permettent de contenir la propagation de cette maladie.